Bella è il passero

Elisabeth

25 mars 2023 – fin d’après-midi

Mon téléphone se met tout à coup à vibrer. Je termine de signer la décharge pour le chien de Mme Stevens en laissant mon regard vagabonder sur l’écran. Un sourire ravi s’esquisse sur mes lèvres lorsque son prénom s’affiche. Rapidement, je lâche mes fournitures pour le lire, mais c’est un froncement de sourcil inquiet qui étire les traits de mon visage : je peux te déposer lilo au travail stp?? je dois aller a l'hopital j't'explique en arrivant.

L’hôpital ? Qu’est-ce qu’il veut dire ? attends…me déposer Lilo ? quoi ici ?  maintenant ? Mais…il ne me laisse jamais être seul avec elle ? qu’est-ce qu’il a bien pu se passer ? Mes doigts fins pianotent rapidement pour lui répondre. En attendant sa venue, je passe un coup de fil à mon frère pour reporter notre dîner au restaurant. Heureusement, Nino ne met pas très longtemps à arriver, le visage crispé d’inquiétude. Pendant que Lilo se laisse distraire par le chaton des Robberts, venu pour ses vaccins, Nino hâte vite le pas dans ma direction. Mains dans les poches de ma blouse, je le dévisage, soucieuse : Nino qu’est-ce qui se passe ?

J'suis désolé, j'ferais pas ça si c'était pas urgent, Bella, j'te jure. Mon frère...! Il semble complètement perdre pied. Orazio et la copine de Gabriel ont eu un accident, ils sont à l'hôpital, j'en sais pas plus, mon frère vient de m'appeler, et cazzo di mierda... Tu veux bien garder Lilo, tu la ramènes chez toi et je vous rejoints ce soir, ok ? Mon visage se crispe un peu plus à mesure qu’il entre les détails. Dylan et Orazio ? Oh non…j’espère que c’est pas trop sérieux… Je reste un peu sans voix, d’abord parce que c’est très soudain et ensuite parce que Nino est tellement anxieux et bouleversé par la situation qu’il parle très vite. C’est à peine si je peux réagir…Euh….ok, répondis-je incrédule en acquiesçant d’un signe de la tête.

J'lui ai rien dit dans les détails, pour le moment, j'veux pas qu'elle s'inquiète... J'te tiens au courant quand j'en sais plus, ok ? qu’il ajoute en désignant Lilo un peu plus loin. Je glisse une œillade sur elle puis acquiesce de nouveau de la tête : d’accord. Très vite, il vient prendre mon visage en coupe, le chérit d’une caresse et d’un baiser avant de s’envoler aussi vite qu’il est arrivé.

A plus tard… que je bredouille tandis qu’il a déjà quitté la clinique. Mains toujours plongées dans les poches de ma blouse, mon regard déconcerté glisse sur Lilo, et je me sens tout à coup très anxieuse. Je déglutis redoutant un peu c qui va suivre. Je n’ai jamais réellement fait de babysitting, sans compter que je ne me suis jamais retrouvée seule avec elle jusqu’à aujourd'hui…et si je m'y prenais mal ? Mon cœur se met à palpiter atrocement...oh non...et si elle me détestait ? je secoue négativement la tête pour me remettre les idées en place et reprendre un peu de contenance.

Allez. Ça va le faire ! dis-je à moi-même. J’humecte mes lèvres puis prends une profonde inspiration avant de me diriger vers la petite. Je viens m’abaisser à son niveau puis lui adresse un grand sourire : Hey. Ton papa a quelque chose d’important à faire, je joins alors les mains. Alors en l’attendant, que dirais-tu d’enfiler une jolie blouse et d’être ma super assistante ? Il me vient alors une idée, et j’en redouble un sourire chaleureux.

Je fais mine d’observer les alentours puis vient lui murmurer : Il y en a plein des comme lui au sous-sol. je désigne le chaton des Robberts. une maman a eu une portée de six chatons. Tu pourrais leur donner le biberon. Ça te dit ?

Bella è il passero

Elisabeth

25 mars 2023 – fin d’après-midi

Le sourire qu’elle me rend lorsque je lui propose de m’assister est assez encourageant. Puis, lorsque je mentionne la portée de chatons, son visage angélique rayonne. Immédiatement elle me rejoint, glisse sa main dans la mienne, ce qui l’espace de quelques secondes me surprend. Mes doigts resserrent doucement leur étreinte et la guident jusqu’à mon bureau. J’y récupère ma deuxième blouse et l’aide pour l’enfiler. Ensuite, je viens m’agenouiller à son nouveau pour lui retrousser les manches et accompagne le vêtement d’une ceinture en tissu pour y coincer le tissu blanc, afin d’éviter qu’elle ne se prenne les pieds dedans. J’attrape un stylo et lui glisse dans la poche avant : Une dernière petite touche et voilà ! Parfait ! Une belle petite assistante. je lui coule ainsi un grand sourire puis me relève en faisant claquer mes mains. Bon ! prête à découvrir les petits monstres poilus ?

Je lui prends la main afin de descendre les escaliers qui mènent au sous-sol. Alors que je me dirige vers la cage aux chatons en train de dormir, sa petite voix s’exprime avec mélancolie : Est-ce que mon tonton Orazio va mourir ? J'ai entendu papa...

Dos à elle, je me stoppe dans mon élan et mon regard un instant se perd dans le vide. Oh non…je déteste cette situation…qu’est-ce que je suis sensée lui dire ? Je ferme brièvement les yeux pour expirer un soupire nasal très discret. Je me retourne, essayant de garder un petit sourire sur mes lèvres quand je croise son regard tout penaud : Hey… je me rapproche pour venir à nouveau me mettre à son niveau, lui prends la main et lui coule un regard rassurant : Tu sais, être à l’hôpital ne signifie pas toujours qu’on va mourir. On y va aussi pour se soigner. Je me surprends alors à venir doucement couvrir le haut de sa petite tête blonde d’une caresse. Ne pense pas à ça. Ton oncle est quelqu’un de fort. Je suis sûre que ça va aller. Seigneur…j’espère que je ne me trompe pas…

Bella è il passero

Elisabeth

25 mars 2023 – fin d’après-midi

Je n’ai jamais eu à rassurer une enfant car jusque maintenant, j’ai toujours été celle qu’on rassure dans la famille. Ça me fait bizarre de me retrouver dans le rôle maternant. Je ne sais pas même si j’endosse ce rôle comme il le faudrait. Je lui souffle quelques mots doux et rassurants en espérant que cela puisse chasser son inquiétude. En guise de réponse elle me prend de cours en venant m’enlacer. Je la regarde faire surprise et incrédule, la bras à demi-ouvert, figés dans le vide. Finalement, ils viennent ensuite la chérir en s’enroulant autour d’elle, l’une de mes mains se glissant dans sa petite chevelure dorée.

Pour lui changer les idées, je l’emmène au sous-sol, là où les animaux malades et blessés se reposent. Elles semblent absorbés par les petits chatons qui occupent son temps tandis que j’attends que Nino donne de ses nouvelles. Et, comme si quelqu’un là-haut avait secrètement lu dans mes pensées, mon téléphone se met à vibrer. Je le sors de ma poche, découvrant le prénom de Nino s’afficher sur mon écran. Je décroche sans plus attendre : Allo?

Bella... Est-ce que ça va avec Lilo ?

Oui oui. Tout va bien ne t ‘en fais pas. Ca donne quoi de ton côté? j’essaie de ne pas laisser paraître le sujet de notre conversation afin de ne pas contrarier la petite Lilo. Je reste donc assez évasive.

Ecoute... C'est plus grave que ce que je pensais...

Ah ?

Orazio et Dylan sont tous les deux au bloc, ils ont perdu beaucoup de sang...

Oh. Je vois. Je n’ai pas envie de l’inonder de question qui seraient susceptible d’alerter la petite fille.

Nonna est en état de choc...Gabriel est... Il dit que c'est des blessures par balles... ça n’a pas l’air de bien se présenter pour eux.

D’accord je...

J'peux pas les laisser, je... Faut que je reste avec eux.. je pince les lèvres.

Je...je comprends. je mords l’intérieur de ma joue avec violence à l’idée d’annoncer à la petite qu’elle ne reverra pas son père pour l’instant.

Je... Ecoute, je vais prévenir Olivia pour qu'elle passe récupérer Lilo... Merci... Je...

Non. Ecoute. Laisse. Je... Je soupire je m’occupe de l’emmener chez moi et tu nous rejoins quand tu as fini. Okay? Je t’écris plus tard. Bisous. Je raccroche en prenant soin de lui envoyer ce sms :

Je suis désolée, Lilo est à côté de moi, je n’ai pas trop osé parler devant elle de peur qu’elle s’inquiète davantage. Elle sait qu’il se passe quelque chose. Je l’emmène chez moi. Ne dérange pas Olivia, c’est ta semaine. Je m’occuperais d’elle jusqu’à ton retour. Concernant ton frère et Dylan, des blessures par balle ? Mais que s’est-il passé ? J’espère qu’ils vont s’en sortir...tiens moi au courant!!

Une fois le message envoyé, je fais glisser mon téléphone dans la poche arrière de mon jeans et reviens vers la gamine pour l’aider à prendre soin des petites boules de poils. Trente minutes plus tard, nous les remettons dans leur petit cocon et je viens m’abaisser à son niveau :Hey. J’ai eu papa au téléphone. Il ne va pas rentrer tout de suite. Du coup, j’ai vu avec lui, on va chez l’attendre chez moi. On s’arrête au Mac do sur la route ? dis-je avec un sourire plein de tendresse.