Velnio Namas

Elisabeth & Les autres

31 octobre 2022 – 18 h 30

J’aurais dû garder cette information pour moi. Dès l’instant où ses doigts tremblants ont ouvert cette boîte, dès l’instant où ils ont fébrilement tenu cette arme, mon cœur s’est soudain arrêté, le temps que mon esprit comprenne le sort qui nous est réservé. Mon cœur s’est soudain accéléré, et accéléré, dans une course infernale. Chaque partie de mon corps se fige dans la torpeur, et les battements incessants, puissants et douloureux de mon palpitant retentissent jusque dans ma tête et le bout de mes doigts. J’ai du mal à respirer et je commence à trembler.

Dans cette tragédie, je suis ce personnage sur le point de jouer son dernier acte, pleinement conscient de son sort funeste et qui attend que la Mort vienne le prendre. Je vais mourir et je ne peux rien faire contre ça. J’ai les mains liées, la peur au ventre et des regrets par milliers. Je sens la crise d’angoisse monter : Non… balbutiai-je sous le choc, la bouche entrouverte, les yeux écarquillés, perdue quelque part dans le vide.

Je ne prête guère attention aux autres, si ce que le choix imposé par notre ravisseur suscite chez eux. Ils commencent à s'agiter et à s'engueuler et pourtant leurs propos, malgré leur clarté, m'apparaissent tels d'inaudibles sons lointains. Trop préoccupée par le temps qu'il me reste et le sort qui m'attend, j'appelle désespérément mon petit frère: Jay… chuchotai-je sans que son prénom ne vole à ses oreilles. Jay… nouveau chuchotement qui se perd dans l’air lugubre de cette pièce. Mon corps se raidit, mes poings se contractent. J’amorce le réflexe d’ôter mes mains de la chaise, mais la pression des colliers de serrage exercée contre ma peau, me rappelle que je suis prisonnière. Je grimace légèrement puis m’agite sur mon siège, le regard paniqué, mais désespérément rivé sur mon seul ancrage ici: Jay !!! hurlai-je dans un cri plaintif et suppliant. Cette fois, il m’entend et vient à moi.

Mes larmes m’échappent à l’idée de ce qui risque de m’arriver très bientôt. Je voudrais m’engouffrer dans ses bras, me lover une dernière fois contre lui et lui dire tout ce que je n’ai jamais osé lui dire: Jay…  nos prunelles se retrouvent, et je pleure à l’idée de mourir, de l’abandonner seul, ici. Ça ne peut pas se finir maintenant…pas comme ça…il y a tellement de choses que j’aimerais lui dire, tellement de choses que j’aimerais faire, tellement de regrets…j’ai peur de mourir…

Jay…écoute-moi…j’en prie, haletai-je la respiration haletante par mes sanglots. je n’ai plus beaucoup de temps… je lui fais un signe de tête pour lui demander discrètement de se rapprocher. Je veux que tu fasses quelque chose pour moi…

Velnio Namas

Elisabeth & Les autres

31 octobre 2022 – 18 h 30

 Arrête… Dit pas de bêtise tout va bien se passer… Non. Je fais un non catégorique de la tête.

Non, tu le feras toi-même y'a pas moyen … Ne nous faisons pas d’illusions et rendons-nous à l’évidence. Je vais mourir. Si les choses ont été écrites ainsi, elles ne peuvent et ni ne doivent être changées. Je ne veux pas mourir, mais, je ne veux pas être la cause du malheur de tous ces pauvres gens pour avoir voulu échapper à ce qui s’apparente à mon destin. J’ai déjà ma propre croix à porter et dieu seul sait à quel point son poids m’est insupportable. Je ne veux pas vivre avec d’autres morts sur la conscience. Jay…tu sais bien que je ne peux pas... je le dévisage tristement, approche, j’ai quelque chose à te dire…

Tu te rapproches, assez près pour que le reste du groupe n’entendent pas notre conversation. Le ton de ma voix s’imprègne de douceur et se fond dans des chuchotements : Je veux que tu fasses quelque chose pour moi. Parce que je ne serai plus là pour le faire... je force un sourire, mais la peine qui résident derrière est une évidence. d’abord, promets-moi de vivre. De tout faire pour rester en vie et sortir d’ici. Tu me le promets hein ? je marque une pause. Dis à papa, Maman, Nate et Val que je les aime...et que je suis désolée… ajoutai-je en humectant mes lèvres sans jamais délier mon regard céruléen du tien.

Quand tu seras sorti d’ici, rends-toi au restaurant le Taurus dans le quartier de Coconut Grove. Là bas, il y a un garçon qui s’appelle Nino. Petite pause. Dis que que…que je ne regrette rien et... Un larme s’échappe de plus bel pour s’écouler sur ma joue rosie de chagrin. qu’il a été dans mes pensées jusqu'à la fin… mon regard vient choir sur mes cuisses, tandis qu’une autre larmes m’échappe ainsi qu’un sanglot.

Je tente de réguler ma respiration afin de trouver la force de t’avouer l’inavouable, ce que je cache depuis des mois, ce que mes lèvres n’ont jamais trouver la force de te souffler. Mais puisque c’est la fin, je refuse de mourir en te sachant fâché, sans t’avoir partagé ce que je m’efforce d’enfouir sous des pilules et derrière des sourires. Je déglutis péniblement, la gorge serrée, le cœur tambourinant affreusement. Je te fais signe de te rapprocher un peu plus pour que tu me tendes l’oreille. Et, c’est la respiration tremblante et saccadée, la voix étouffée dans quelques sanglots que je confesse mon pêché dans des chuchotements que toi seul peut entendre : j’ai tué Cassidy… d’autres larmes viennent noyer ma joue.

tu sais à quel point elle a fait de ma vie un véritable enfer…à cause d’elle, j’ai perdu mon travail à la clinique, j’ai été renvoyé de l’UCLA. Et quand elle a commencé à tourner autour de Doyle je… je reprends ma respiration et un rythme de voix plus régulier. ça a été plus fort que moi. J'ai….j’ai….j’ai pété les plombs. Je l’ai poussé dans cet escalier…  je laisse ma tête choir contre ton épaule pour expier toutes les larmes de mon corps sans parvenir à m’arrêter. c’est pour ça que j’ai quitté Los Angeles sans prévenir…Jay… mes pleurs s’intensifient, Je dois vivre avec ce que j’ai fait….je ne peux plus me regarder en face parce que…parce que….une partie de moi ne peut s’empêcher de ressentir un soulagement...à l’idée qu’elle ne pourra plus jamais me nuire... Je reste un certain moment à me morfondre contre ton épaule avant de finalement relever la tête et affronter tes iris océaniques : j’avais tellement peur de te perdre si tu l’apprenais. Peur que tu me regardes comme un monstre…parce que moi...c’est comme ça que je me vois Jayden… Je te fixe sans un mot, les yeux rougis : Pardonne-moi…

Velnio Namas

Elisabeth & Les autres

31 octobre 2022 – 18 h 30

J’ai l’affreuse sensation d’être sur l’échafaud et que peu de temps désormais me sépare d’une mort certaine. Il y a tant de choses que j’aurais dû faire, que j’aurais dû dire et à contrario que je n’aurait pas dû. C’est à croire que ma vie est une succession entière d’erreurs et de mauvais choix. On ne peut pas dire que j’aie montré l’exemple. J’incarne tout ce tu ne dois surtout pas être Jay. Lâche. Oui j’ai été lâche. La peur m’a toujours empêchée d’agir comme il se devait. Je suis emplie de regrets. J’ai abandonné ma famille alors que l’union est toujours ce qui faisait notre force. Pourtant mon amour ne s’est jamais tari et c’est parce que je vous aime tous que j’ai fui. Je ne pensais pas mourir aussi vite, ni que tu sois celui avec qui je partage ces derniers instants de ma vie. Mais, je suis heureuse que ce soit toi. Tu ne sembles pourtant pas comprendre que c’est la fin, pourtant c’est évident non ? Ne sois pas dans le déni Jay, je suis nouée à cette chaise, avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Ne vois-tu pas l’évidence. Je force un sourire, dans ce moment fatidique : Vois la vérité en face Jayden. Il n’y en a aucune. On sait tous les deux comment ça va se finir.

Tu te contentes ensuite d’acquiescer à me requête concernant Nino. Là encore, j’ai été lâche. Et, j’espère qu’il me pardonnera pour ne pas avoir assumé ce que mon cœur éprouve en secret : Merci..

Puisque les minutes me sont comptées, je n’ai plus rien à perdre désormais. Et même si j’aimerais que tu gardes un une bonne image de moi malgré mes erreurs, je ne veux pas mourir en étant moi même un mensonge. Cette image de moi que vous avez tous, de la pauvre Elisabeth, si gentille, si innocente, celle qu’on harcelait au lycée, incapable de se défendre, cette image n’est qu’un piètre mensonge. Il est temps que tu apprenne la vérité. Dieu ne me pardonnera sans doute jamais ce pécher, mais je veux partir telle que je suis : une meurtrière. J’ai du mal à respirer, j’ai l’impression qu’on me serre violemment la gorge et que mon cœur en flamme va exploser ma cage thoracique. J’ai envie de vomir. Je ne sais pas si c’est l’angoisse de t’avouer la vérité ou celle de n’être bientôt qu’un souvenir ou alors ce putain de gaz que nous avons inhalé. Je ne sens même plus les larmes couler sur mes joues, mais je sais que mes yeux me brûlent. Mes mains, bien que nouées aux bras de cette chaise tremblent. J’ai froid. Je me sens fébrile. Et lorsque tu t’approches un peu plus près comme je te l’ai demandé, j’avoue l’abominable vérité.

Une courant chaud, agréable et analgésique me parcourt l’échine, comme si un poids soudain se délestait de mes épaules. Le voile est levé, et même si j’ai toujours la nausée, même si mon coeur se déchaîne contre ma poitrine, même si la honte me dévore et empoisonne mes tripes, cette lourdeur, cette oppression qui m’étouffait peu à peu s’estompe, ne me laissant plus qu’avec la mort au-dessus de la tête et la vérité qui ne s’arrête plus de franchir le seuil de mes lèvres. Pardonne-moi Jayden.

C’était un accident...tu ne voulais pas sa mort.  Les traits tirés par la fatigue, je te dévisage, incrédule, me demandant si tu as bien conscience de ce que tu es en train de me dire. À vrai dire, cela soulève une réelle question. Une partie de moi est soulagé que cette salope soit morte, donc l logique voudrait qu’une partie de moi voulait qu’elle crève non ? Un violent mal de crâne me foudroie, je ferme les yeux en grimaçant : Je... les mots me manquent à nouveau. J’ai peur de ce que je pourrais répondre. Je n’arrive plus à réfléchir avec lucidité.

Je … Je sais pas… On aurait dû affronter tout ça ensemble… Tu es ma sœur quoi qu’il arrive…   ta...ta sœur ? Alors...à tes yeux et dans ton coeur, je ne suis pas ce monstre que je vois quand je me regarde dans le miroir ? Mon regard céruléen et désemparé se pose sur toi : Jay Je…. je déglutis, J’avais tellement peur que... mais je n’ai pas le temps de terminer ma phrase que Raven revient vers nous. Visiblement, elle a fait son choix….